Sans toi

Je tire les rideaux.
La lumière me brûle les yeux, me chuchote que le temps est doux et silencieux.
Trop belle, elle n’est que mensonge.
Comme la couverture chaude sous laquelle je me cache.

Et j’entends ses petits pas derrière la porte.
Il hésite. Il est tétanisé.
Moi aussi j’ai peur.
De cette vie sans toi. De ce futur qui n’existe pas. De ces fantasmes mort-nés.
Voilà ce que c’est la vie. Un jeu macabre qui nous fait tourner comme une petite danseuse dans ces vieilles boîtes à musique. Quelqu’un enclence la clé et on tourne, tourne, le sourire forcé, les bras en l’air comme si tout était beau et magique.

Et puis tout à coup il est devant moi. Je ne l’ai pas entendu.
Il est tellement attentionné.
Il cherche mon regard, mais je m’enfouis en moi.
Je ne veux pas respirer, vivre dans un corps froissé, plié, effacé.
Il ne me sert plus à rien ce corps.

Je pose ma main sur mon ventre, à peine arrondi, vide, sans âme.
La mort s’est déposée là où naît le désir et la sensualité. Là où naît la vie.
Sur l’instant, je n’ai rien senti.
Et maintenant l’absence, une béance insupportable. Le corps percé.

J’ai rêvé ne faire qu’un à deux, puis à trois, et maintenant je ne suis plus que rien.
Une épave qui flotte, dans l’incapacité de disparaître.

Il effleure mes cheveux, à peine.
S’asseoit tout au bord du lit, comme une ombre.
Comme si j’allais le rejeter violemment.
Il a raison.
Je veux le frapper, me frapper, me tuer. Mourir.
La vie sans toi, c’est juste pas possible.

Puis l’abîme, puis le vertige.
Et je crie, je hurle, la voix arrachée.
Alors il me prend dans ses bras, me transporte de toute sa force, de toutes ses larmes.
Il est là, il m’aime. Plus que tout. Plus que toi.
Nous serons que deux, éternellement.

Ecrits intimes.
21/11/2017 pour le projet « Tous pour BOILT »